André Masson

(1896, Balagny – 1987, Paris)
Peintre français. C’est à Bruxelles qu’il s’initie à la peinture, puis il entre aux Beaux-Arts de Paris en 1912. Après un voyage en Italie et en Suisse, il est mobilisé en décembre 1914. Grièvement blessé en 1917, il est hospitalisé puis interné en asile psychiatrique pour rébellion. Cette expérience le marque profondément : il y découvre l’horreur -mais aussi son envers de stupéfiante beauté. À Paris en 1922, il peint tout en exerçant différents métiers pour vivre – livreur en verrerie ou correcteur au Journal Officiel. Sa peinture, d’un cubisme où s’introduisent des éléments affectivement symboliques, lui vaut un contrat chez Kahnweiler. Installé rue Blomet, il a Miró pour voisin, et son atelier devient un lieu de réunions où se retrouvent Leiris, Artaud, Limbour. La rencontre avec le surréalisme (Breton acquiert les Quatre éléments de 1923) le libère de la structuration géométrique et il se lance à corps perdu dans l’automatisme. En 1927, il met au point ses « tableaux de sable » pour transposer ce dernier dans la peinture même. D’une grande culture littéraire et philosophique, il lit Sade, Nietzsche, les romantiques allemands, les pré socratiques – textes qui forment définitivement sa pensée, et son style. Sur ses toiles apparaissent les métamorphoses les plus stupéfiantes – soutenues par un chromatisme souvent hardi. En 1929, une première rupture avec Breton le rapproche de Bataille – dont il illustrera seul la revue Acéphale. Il entreprend les dessins de Massacres et de Sacrifices, jouant d’une ligne étonnamment agile et incisive. En Espagne où il séjourne longuement et participe à la guerre civile par des caricatures anti franquistes, sa peinture se modifie en fonction des paysages, de la couleur du sol et des roches, de la corrida : elle devient la manifestation d’un esprit « dionysiaque », attentif aux liens entre Éros et Thanatos, à la présence active de la mort dans l’intimité la plus secrète de la vie. Réconcilié avec Breton, il fait avec lui le voyage vers New York, et ils collaborent pour l’ouvrage Martinique charmeuse de serpents. Aux États-Unis où il demeure de 1941 à 1943, sa peinture, qui devient plus calme et atteint un point d’orgue avec Méditation sur une feuille de chêne (1942), influence Pollock et toute la génération de l’expressionnisme abstrait. Il y fait également la découverte de la peinture chinoise, qui le mène, après une période où les toiles offrent une multitude de signes colorés en mouvements, à son époque « asiatique » couvrant les années cinquante : touches de couleurs diffuses et idéogrammes s’affirment avec légèreté sur des fonds transparents – « des surgissements », « des apparitions » qui proposent le versant calme d’une quête ininterrompue vers le secret de l’être. Ultérieurement se réaffirment les cycles de métamorphoses et les agressions de la couleur, tandis qu’il fait réaliser en bronze des sculptures où se retrouve fidèlement sa thématique : omniprésence du sexe, de la cruauté et de la violence, nécessité d’adhérer à tous les excès de l’existence pour que peinture, dessin et sculpture soient à la hauteur d’une démesure qui est celle de la vie même. Une telle ambition, dans ses œuvres les plus déchaînées, a sans doute de quoi choquer le « bon goût » -mais ce dernier est du côté d’Apollon plutôt que soumis à Dionysos.

André Masson

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