Piet Mondrian

(1872, Amersfoort – 1944, New York)
Peintre hollandais, l’un des pionniers de l’abstraction. Il est d’abord enseignant en dessin, mais reprend de 1892 à 1897 ses études aux Beaux-Arts d’Amsterdam. Il effectue de brefs voyages en Europe, revenant rapidement peindre les paysages proches d’Amsterdam. Dans les premières années du siècle, il expérimente, en fonction de ses amitiés et des expositions qu’il visite, diverses techniques : si vers 1907, l’influence de Van Gogh est assez nette, dès l’année suivante sa palette est plus claire et il utilise les théories divisionnistes. Il exécute des variations chromatiques sur le thème de l’arbre (l’Arbre rouge, 1908-1910, l’Arbre bleu, 1909-1910), peint les dunes, l’Église à Domburg (1909-1910) aux couleurs simplifiées. En 1910-1911, le triptyque Évolution indique son appartenance (depuis 1909) à la société théosophique hollandaise, dont la réflexion l’aidera jusqu’en 1916, avant d’être dépassée par sa foi en l’art lui-même, qui absorbera toute autre préoccupation. En 1911, il participe au Stedelijk Museum à la première exposition du Cercle d’art moderne, fondé l’année précédente avec Toorop, J. Sluyters et Kickert, et au Salon des Indépendants de Paris, où il se rend à la fin de l’année. Son travail évolue alors rapidement sous l’influence du cubisme. Partant toujours d’un motif emprunté à la nature, Mondrian le dématérialise progressivement pour aboutir à des compositions où dominent l’horizontale et la verticale : dès 1913, l’abstraction est presque totale (Composition dans l’Ovale) et ce n’est que très fugitivement qu’une forme rappelle le prétexte visuel (Composition n°9, la Façade bleue, 1913-1914). En juillet 1914, appelé au chevet de son père malade, Mondrian retourne en Hollande, où il est obligé de rester jusqu’à la fin des hostilités, mais où il fait la connaissance de Van Doesburg. C’est là qu’il accède, après la rencontre de Van der Leck, à un « style exact », constitué de droites et d’aplats de couleurs pures : il met au point la théorie du néo-plasticisme dont la revue De Stijl, fondée en 1917, devient le principal organe de diffusion. Mondrian y publie de longs articles, parfois sous forme de dialogue philosophique, comme Réalité naturelle et réalité abstraite (paru dans onze numéros successifs en 1919-1920). En 1917, il élabore ses Compositions avec plans de couleurs : sur un fond uni, des rectangles et carrés colorés sont disposés de façon à détruire toute illusion de volume et de profondeur. De retour à Paris en 1919, il fait paraître l’année suivante, chez L. Rosenberg, sa brochure Le Néo-Plasticisme, dédiée « aux hommes futurs ». Dès 1923, une exposition du groupe De Stijl est organisée chez le même marchand, mais sans succès. Pour vivre, Mondrian doit à cette époque exécuter de petits tableaux de fleurs qui trouvent aisément preneur en Hollande. Mais son atelier commence à être visité par les artistes (Vantongerloo, Seuphor). En désaccord avec Van Doesburg, Mondrian quitte De Stijl en 1924. Les œuvres qu’il réalise dans les années suivantes sont appelées à devenir les archétypes du néo-plasticisme : la surface est divisée inégalement par une verticale et une horizontale noire et, en général, un seul des quatre secteurs est à nouveau morcelé ; les formes ainsi déterminées sont peintes de couleurs primaires. Des variantes sont progressivement introduites : réduction et rejet des surfaces colorées à la périphérie, épaisseur plus ou moins marquée des lignes noires. L’œuvre commence à se diffuser internationalement, notamment grâce aux achats de K. Dreier, à la présence de deux tableaux dans le « Cabinet des abstraits  » conçu par El Lissitzky pour le musée de Hanovre. En 1929, Mondrian réalise un unique Tableau-Poème avec un texte de Seuphor. En 1931, le travail sur les lignes noires aboutit au tableau le plus radical : deux lignes d’épaisseur différente se croisent dans le coin gauche, en bas de la toile. Bien que discret, Mondrian devient un personnage éminent des groupes Cercle et Carré puis Abstraction-Création. Des disciples commencent à se manifester (Gorin), et son influence ne cesse de croître. L’atelier de la rue du Départ accueille Moholy-Nagy, Gropius, Freundlich, J. Peeters, Gabo, Nicholson, Stazewski. Préoccupé uniquement par la progression de son travail, il refuse de se marier, vit modestement (en 1936, il reçoit encore une allocation de « chômeur intellectuel ») et s’attache seulement à faire que chaque œuvre constitue un « pas de plus en avant ». En 1938, craignant la guerre, Mondrian part pour Londres, où son atelier est proche de ceux de Gabo et Nicholson. Sur les toiles, les lignes se multiplient (Trafalgar Square, Place de la Concorde, achevées en 1943). Les bombardements l’obligent à gagner New York en 1940. Il y retrouve F. Glarner, mais aussi tous les artistes européens en exil (Léger, Ernst, Chagall, Dalí, Breton…). Membre de l’A.A.A., il rédige à son intention l’article A new Realism ; proche de P. Guggenheim, il est le premier à lui signaler l’intérêt des toiles de Pollock. C’est en avril 1941 que les lignes noires, sur les toiles, font place à des lignes de couleurs (New York City I, 1941-1942). Puis les surfaces colorées se multiplient, constituant à elles seules la grille de la composition (Broadway Boogie Woogie, 1942-1943). « Je me rends compte seulement maintenant », écrit-il alors à J.J. Sweeney, « que mon travail en noir et blanc avec des petits plans de couleurs a été seulement du dessin en peinture à l’huile ». Lorsqu’il meurt, il laisse inachevées un certain nombre de compositions, dont Victory Boogie Woogie, tableau « losangique » (un carré sur un sommet) qui renoue avec un format utilisé dans les années vingt, mais ne présente en fait de lignes que des juxtapositions de carrés colorés. Jusqu’à la fin d’un travail conçu comme un cheminement spirituel, Mondrian démontre que les potentialités du néo-plasticisme sont loin d’être épuisées.

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