Pierre Alechinsky

(1927, Bruxelles)
Peintre d’origine belge. Dès la fin de ses études à l’École des arts décoratifs de la Cambre, la découverte de cobra et la rencontre de Dotremont l’enthousiasment : il est dès lors l’un des membres les plus actifs du groupe – à l’intérieur duquel il commence à travailler « à quatre mains », notamment avec Appel et Dotremont, produisant à l’huile des toiles où s’agitent des multitudes de formes-personnages tandis qu’il montre déjà son goût pour les titres ironiques, les Gilles de Binche et les courbes. Après la dissolution de cobra, il s’installe à Paris, étudie la gravure et côtoie les surréalistes. Au Japon en 1955, il tourne un film sur la calligraphie : il abandonne progressivement l’huile, privilégie l’encre, puis l’acrylique, et travaille désormais courbé en plaçant au sol sa toile ou ses feuilles de papier. Sa matière, très fluide, est propice à la naissance de lutins, sauriens plus ou moins probables, volcans et torrents – un bestiaire et une géographie suscitant aussi bien l’inquiétude que le sourire de connivence. Exposant régulièrement pendant vingt ans à la galerie de France à partir de 1958, sa carrière s’internationalise. En 1965, il réalise sa première toile à remarques marginales (Central Park) : sur les quatre côtés de l’image centrale se déroule un ensemble de vignettes qui sont des variantes, des ajouts, des compléments plus ou moins logiques instaurant une multiplicité de narrations parallèles. Ces encadrements alternent dès lors avec des prédelles aussi bien dans sa peinture que dans ses très nombreuses gravures : l’imagination plastique d’Alechinsky prend appui sur chaque trait accompli, rebondit sur toute image antérieure. S’il travaille volontiers sur des liasses de notaires, des cartes de géographie ou des papiers maculés d’empreintes et de traces – qu’il maroufle ensuite sur de vastes toiles – c’est que, craignant la surface vierge, il préfère transformer, intégrer à son univers de formes et d’entrelacs ce que la chance lui met sous les yeux, à portée du fin pinceau de poils de chèvre, fécond en méandres et mouvements ophidiens d’où naissent par exemple « une gravitation de microbes survoltés dans un enroulement de vagues, une rixe de gnomes interlopes hantés par l’azur » (J. Dupin). Exemplairement fidèle dans ses admirations (Dotremont, mais aussi Michaux ou B. Van Velde) Alechinsky leur consacre des textes d’une grande pertinence ; il aime collaborer avec ses amis écrivains (J. Mansour, Tardieu, Caillois, Butor, etc.), soit en les « illustrant », soit en les sollicitant pour intituler ses travaux (Le Test du Titre, 1967). Dans ses propres ouvrages (Titres et Pains perdus, 1967, Roue libre, 1971, L’autre main, 1988, etc.), il déploie volontiers un humour caustique en même temps qu’une capacité à traquer les analogies – entre les choses, entre les mots – égale à celle qu’il montre pour en produire de toujours nouvelles entre les formes colorées.

Volcan ensorcelé, Pierre Alechinsky, 1974


Volcan ensorcelé, huile sur papier et toile, 1974


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