Alexander Rodtchenko

(1881, Saint-Pétersbourg – 1956, Moscou)
Artiste russe. De la deuxième génération des créateurs non objectifs, il suit de très près les grands inventeurs : Malevitch, Kandinsky ou Tatlin. Ses premières œuvres non objectives à la fin 1915 peuvent être considérées comme la réponse formaliste à un ensemble de problèmes que l’art moderne pose à ce moment. Dès ces travaux, réalisés à l’aide du compas et de la règle, apparaît le refus de l’esthétique romantique qui avait marqué profondément le début de l’art moderne (cette sensibilité resurgira en 1920 dans des compositions abstraites, carrément expressionnistes). Les racines d’un apprentissage analytique lui manquant cruellement, Rodtchenko est obligé dès 1916 d’effectuer un retour vers l’analyse cubiste. L’évolution de sa peinture sera par ailleurs marquée par de nombreuses volte-face formelles, qui témoignent d’une nature cyclothymique ébranlée au contact du bouleversement majeur que constitue pour sa génération la révélation de l’art non objectif. Son œuvre se développe très souvent suivant le mode réactionnel : à la série « blanc sur blanc » de Malevitch, il répond par des œuvres « noir sur noir », à la peinture expressionniste de l’année 1918, il oppose à partir de 1919 l’esthétique du linéisme. Ses contacts avec Kandinsky, qui lui cèdera des pièces d’habitation dans son immeuble moscovite et qui l’emploiera pendant un certain temps comme secrétaire quasi personnel à la Section des musées, marquent également l’évolution de sa peinture. Engagé dans l’épopée constructiviste, Rodtchenko affirme pour la première fois dans l’art les trois couleurs fondamentales à l’exposition « 5 x 5 = 25 » (Moscou, septembre 1921). Ces trois monochromes, qui marquent l’évolution de l’art abstrait du siècle, provoqueront la réponse cinglante de Taraboukine qui parlera du dernier tableau. Deux mois plus tard, Rodtchenko cosigne le célèbre manifeste productiviste que vingt-cinq peintres moscovites approuvent à l’instigation d’Ossip Brik. Ils s’engagent à abandonner la pratique picturale pure au profit de la création d’objets usuels. À partir de 1922, Rodtchenko se consacre à la publicité, à la photographie, au photomontage. Son œuvre photographique, largement connue, témoigne d’un grand talent plastique et d’un sens du raccourci dynamique hors pair. En 1923, son travail avec Maiakovski pour l’agence de publicité Rosta lui apporte la célébrité, tandis que c’est dans l’œuvre typographique qu’il atteint la plus grande maîtrise. Intimement lié au groupe productiviste moscovite (Lef, Brik, Gan), Rodtchenko apparaît à ce moment comme le modèle même de plasticien-ingénieur. Fuyant les poncifs du réalisme socialiste, il se réfugie au cours des années trente dans la pratique picturale : c’est le registre fantasmagorique des scènes de cirque qui convient le mieux à son tempérament de saltimbanque et à une existence qui à ce moment se situe hors des circuits officiels. Rodtchenko meurt totalement oublié, mais son œuvre, conservée dans sa majorité, connaîtra une grande popularité en Europe occidentale au cours des années quatre-vingt.

Stairs, Alexander Rodchenko, 1933
Stairs, photographie, 1933

Girl with a Leica, Alexander Rodchenko, 1934
Girl with a Leica, photographie, 1934


Publié

dans

Étiquettes :