Robert Smithson

(1938, Passaic, New Jersey – 1973, Amarillo, Texas)
Artiste américain, protagoniste du Land Art. Après ses études à l’Art Students’ League, à la fin des années cinquante, il commence à peindre dans la lignée de l’expressionnisme abstrait. En 1962, il se tourne vers la sculpture, rencontre Carl Andre, Flavin, Judd et LeWitt et participe avec eux à l’exposition « Primary Structures » au Jewish Museum de New York, l’une des premières manifestations du Minimal Art. Parallèlement à sa création artistique, il mène une importante activité de critique et de théoricien, en particulier sur la manière de présenter l’œuvre : « Les musées, comme les asiles et les prisons, ont leurs gardiens et leurs cellules… Les œuvres d’art vues dans de tels espaces semblent sortir d’une sorte de convalescence esthétique. On les regarde comme des invalides inanimés, en attendant que les critiques les déclarent guérissables ou incurables » (Cultural Confinment, 1967). Il est vivement impressionné par les remarques de Tony Smith (qu’il tient pour « l’agent de l’infini ») sur une autoroute inachevée du New Jersey : « L’autoroute et une grande partie du paysage étaient artificielles, mais on n’aurait pas pu appeler ça une œuvre d’art. En même temps cela m’a fait un effet que l’art ne m’avait jamais fait. » À cette époque, il est engagé comme conseiller artistique d’une société de génie civil qui construit le terminal aérien de Dallas-Fort Worth. Smithson, fasciné par « les chaussées, les trous, les tranchées, les monticules, les sentiers, les routes, les terrassements… », propose, au lieu d’installer des œuvres d’art dans l’aéroport, de créer « un art dont le paysage lui-même serait le matériau ». C’est le début de ses grandes réalisations in situ (Sites), mais il coordonne ce travail à l’extérieur avec un travail à l’atelier (Non-Sites). « J’allais dans des régions éloignées, je choisissais un endroit, je ramassais une certaine quantité de matériaux bruts… ». Smithson les place dans des casiers évoquant ses anciennes sculptures minimalistes, et expose l’ensemble avec une carte et un descriptif très précis (Non-Site, Palissades, Edgewater, N.J., 1968). « Les pièces et les systèmes sont non figuratifs ; ils ont pourtant une relation avec le site et, d’une certaine façon, en constituent la description. » Ses grands Earthworks se succèdent rapidement : Asphalt Rundown dans une carrière de la banlieue de Rome, Partially Buried Woodshed à Kent (Ohio) et surtout en 1970, Spiral Jetty. « Smithson loue pour une durée de vingt ans un terrain de quatre hectares en bordure du Grand Lac Salé dans l’Utah, et avec du matériel de terrassement loué, déplace quelque 6 000 tonnes de terre et de pierraille pour construire une gigantesque spirale dans les eaux rouge sang du lac… Sa forme rappelle à la fois les cristaux de sel, les organismes microscopiques qui abondent dans le lac, et à l’échelle macroscopique, les nébuleuses spirales… Les engins qui l’ont construite, et dont les traces demeurent visibles, deviennent eux aussi des symboles de la civilisation technologique et des dinosaures qui hantaient l’Utah à l’ère secondaire » (I. Sander). En 1973, il entreprend son dernier projet, Amarillo Ramp, mais il meurt dans un accident d’avion en survolant le site. Le projet est terminé par Serra. « Prolongement de la grandeur de l’expressionnisme abstrait, alliée aux formes emblématiques du minimalisme » selon la formule de Morris, l’œuvre de Smithson est l’un des sommets de l’art américain d’après guerre.

Spiral Jetty, 457 m de long et 4,60 m de large, boue, cristaux de sel, rochers de basalte, bois et eau, Grand Lac Salé près de Rozel Point à Salt Lake City, Utah, États-Unis, 1970

Spiral Jetty, R Smithson, 1970
Spiral Jetty, R Smithson, photo prise en 2005

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