Appropriation

Avec Internet, un nombre incalculable d’images est diffusé. La copie, la récupération et l’appropriation*, qui sont des gestes artistiques anciens, se trouvent au cœur de la démarche de beaucoup d’artistes contemporains. Ils interrogent la notion de l’original de l’œuvre d’art ainsi que la valeur et le sens des signes qui composent notre quotidien.

Emparez-vous de diverses images, appropriez-les-vous et créez une histoire cohérente à partir d’elles.

#appropriation #démarche #fiction

Récupérer une ou plusieurs images suffit-il à faire œuvre ? Face à la prolifération des images sur Internet, quelles stratégies artistiques avez-vous adoptées ? Expliquez comment l’appropriation d’images sert votre projet artistique et narratif.

* Appropriation : adaptation d’une œuvre ou d’une image pour sa propre création, mais tout en conservant l’idée générale.

Picture Generation

L’appropriation peut être effectuée avec une intention critique ou comme un hommage. Cette distanciation vient du critique américain Douglas CRIMPS qui présente à l’automne 1977 une exposition intitulée Pictures à l’Artists Space de New York, un concept qu’il nuancera dans son essai, amer et distant, Appropriating Appropriation (1982). Les premiers artistes sélectionnés pour Pictures sont Sherrie LEVINE, Jack GOLDSTEIN, Phillip SMITH, Troy BRAUNTUCH et Robert LONGO. Cindy SHERMAN avait eu droit un an auparavant à une exposition solo à l’Artists Space. Elle est mentionnée dans la version revue et corrigée du texte du catalogue de Douglas CRIMPS, parue en 1979 dans la revue marxiste Octobre.

Le Whitney Museum of American Art de New York et le Musée d’art contemporain de Los Angeles ont organisé, en 1989, de grandes rétrospectives de la « Picture Generation ».

Du 29 avril au 2 aout 2009, le Metropolitan Museum of Art présente trente artistes de la scène artistique new-yorkaise des années 1970 dans l’exposition, organisée par Douglas EKLUND, « The Generation Photos, 1974-1984 ».

Source Wikipédia

Publicité Marlboro et la photographie de Richard PRINCE, 1989

Références artistiques possibles

  • Hannah HÖCH, Cut with the Dada Kitchen Knife through the Last Weimar Beer-Belly Cultural Epoch in Germany, 1919, collage, 114 x 90 cm. L’artiste expérimente au début du siècle, le photomontage et le découpage/collage d’images à partir de cartes postales. Elle fait de cette pratique un instrument de critique sociale et politique et témoigne de son engagement féministe.
  • Hans-Peter FELDMANN, Bilder, 1968, ouvrage sans texte composé de photographies personnelles et d’images trouvées dans les magazines, dans les journaux, dans les livres. Pour lui, cette imagerie populaire reflète les désirs de notre société.
  • Christian BOLTANSKI, L’album de la famille D., 1971, installation, 150 tirages noir et blanc encadrés de fer blanc, 220 x 450 cm. Christian Boltanski installe dans cette pièce toutes les photos amateurs qui restent de trois générations d’une même famille française. L’artiste aborde la grande Histoire par la petite histoire individuelle : l’histoire de la famille D. appartient à notre mémoire collective. Tenues vestimentaires, coiffures, voitures, paysages urbains, postures sont le reflet de l’après-guerre en France.
  • Sherrie LEVINE After Walker Evans, 1982, photographie. En photographiant une image iconique du célèbre photographe Walker EVANS, elle remet en jeu la figure de l’auteur et l’originalité de l’œuvre d’art pour révéler que notre connaissance artistique repose sur la circulation des reproductions.
  • Richard PRINCE, Untitled (cowboy), 1989, épreuve chromogène, 127 x 177,8 cm. L’artiste récupère le cow-boy des publicités Marlboro et élève ce symbole de la culture américaine au rang d’œuvre.
  • John BALDESSARI, Fissures (Orange) and Ribbons (Orange, Blue): With Multiple Figures (Red, Green, Yellow), Plus Single Figure (Yellow) in Harness (Violet) and Balloons (Violet, Red, Yellow, Grey), 2004. acrylique sur panneau. 305 x 570 cm.
  • Céline DUVAL, 3 temps en 4 mouvements, 2009, 24 posters, 176 x 120 cm
Céline DUVAL, 3 temps en 4 mouvements,
2009, 176 x 120 cm
  • John STEEZAKER, Mask #104, 2011, collage, 25,8 x 20,4 cm. Dans cette série, il superpose deux images, une des années 50 – photos de studio de stars et une autre de cartes postales et entraine le regard du spectateur dans des allers/retours entre les différents plans de lectures des associations créées.
  • Thomas HIRSCHHORN, Collage truth #8, 2012, collage, 46 x 27 cm. L’artiste associe des photos de mode glossy à des photographies ultra violentes de victimes des guerres au Moyen-Orient, pour créer un contraste saisissant et brutal, fondé sur des associations de postures et des répétitions formelles qui questionnent les horreurs de la guerre, de la violence et de la pauvreté, au miroir de structures de contrôle consuméristes comme la publicité.
  • Mishka HENNER, Feedlots, 2013, photographies. La série Feedlots et plus globalement le travail de récupération d’images internet, ont suscité de nombreuses interrogations sur la nature d’artiste. Au fil des entretiens que Mishka Henner accorde depuis 2010, il s’emploie à mettre en valeur son fastidieux travail de collecte et les nombreuses retouches qu’il opère sur les images. S’il ne déclenche pas l’appareil photographique, ses choix sur le fond comme sur la forme des clichés relèvent du geste artistique.
  • Barbara BREITENFELLNER, Untitled (WVZ 323), 2014, collage, 21,2 x 13,4 cm.

Questionnement(s) :

  • La représentation ; images, réalité et fiction : la narration visuelle – l’autonomie de l’œuvre d’art, les modalités de son autoréférenciation – la conception, la production et la diffusion de l’œuvre plastique à l’ère du numérique.

Expérimenter, produire, créer (D1, D2, D4, D5) :

  • Choisir, mobiliser et adapter des langages et des moyens plastiques variés en fonction de leurs effets dans une intention artistique en restant attentif à l’inattendu.
  • S’approprier des questions artistiques en prenant appui sur une pratique artistique et réflexive.
  • Recourir à des outils numériques de captation et de réalisation à des fins de création artistique.
  • Explorer l’ensemble des champs de la pratique plastique et leurs hybridations, notamment avec les pratiques numériques.

Mettre en œuvre un projet artistique (D2, D3, D4, D5) :

  • Faire preuve d’autonomie, d’initiative, de responsabilité, d’engagement et d’esprit critique dans la conduite d’un projet artistique.

S’exprimer, analyser sa pratique, celle de ses pairs, établir une relation avec celle des artistes, s’ouvrir à l’altérité (D1, D3, D5) :

  • Établir des liens entre son propre travail, les œuvres rencontrées ou les démarches observées.
  • Expliciter la pratique individuelle ou collective, écouter et accepter les avis divers et contradictoires.

Se repérer dans les domaines liés aux arts plastiques, être sensible aux questions de l’art (D1, D3, D5) :

  • Interroger et situer œuvres et démarches artistiques du point de vue de l’auteur et de celui du spectateur.

D1 Les langages pour penser et communiquer – D2 Les méthodes et outils pour apprendre – D3 La formation de la personne et du citoyen – D4 Les systèmes naturels du monde et l’activité humaine – D5 Les représentations du monde et l’activité humaine


« Buying Myself Back: A Model for Redistribution »,
NFT d’Emily RATAJKOWSKI, avril 2021, mannequin et actrice américaine

À propos de l’œuvre de Richard PRINCE, Emily RATAJKOWSKI déclare : « en posant pour des photos, et il m’a semblé étrange qu’un artiste chic et très estimé puisse m’arracher un de mes posts Instagram et le vendre comme le sien » et poursuit sur Twitter, ce NFT baptisé « Buying Myself Back: A Model for Redistribution »  est avant tout un moyen de se réapproprier son image et de lutter contre son utilisation abusive par des tiers. 

L’œuvre en question, signée Richard PRINCE et mis en vente à 90 000 dollars à la Gagosian Gallery de Madison Avenue, était simplement le tirage sur grand format d’une publication Instagram de l’actrice, qui était elle-même une capture d’écran d’une photo parue plus tôt dans Sports Illustrated. Elle avait voulu récupérer cette œuvre mais un autre acheteur a finalement eu gain de cause. Finalement, Emily Ratajkowski est parvenue à s’offrir une deuxième œuvre identique en contactant Richard Prince, pour la modique somme de 81 000 dollars.

Source JDG – journaldugeek.com